La cédraie au Maroc : un patrimoine unique et inestimable

La cédraie du Maroc couvre environ 130.000 ha répartis sur plusieurs massifs comprenant quelques futaies dans le Rif, et dans le Haut-Atlas mais l’essentiel est concentré dans le Moyen-Atlas entre 1500 et 2400m, étage montagnard recevant le plus de précipitations. La cédraie est constituée d’une variété endémique, le cèdre de l’Atlas. Les spécimens les plus vieux et les plus impressionnants de cèdres peuvent atteindre une hauteur de 40 à 60m et 1200 ans d’âge, faisant de cet arbre une véritable mémoire vivante de l’évolution climatique du Maroc.

Ce patrimoine naturel unique abrite une biodiversité incroyable et représente un réservoir de ressources inestimables pour les scientifiques et les écologistes. À travers les anneaux de croissance de ces arbres anciens, on peut retracer des millénaires de fluctuations climatiques, offrant des indices précieux sur l’évolution de l’environnement de la région. Cette richesse historique et naturelle fait de la cédraie non seulement un sanctuaire de faune et flore, mais également un laboratoire vivant pour mieux comprendre les défis environnementaux du futur.

La cédraie abrite une faune sauvage remarquable dont le représentant le plus emblématique est le singe “magot” (macaque de berbérie), espèce endémique du cèdre, mais on citera également le renard roux, la genette, le sanglier, la mangouste, le chat sauvage, le cerf de berbérie (réintroduit dans le Parc National de Tazzeka) et de nombreux insectes et oiseaux (circatète, aigle botté, faucons, coucou, chouette hulotte, pic épeiche, rollier d’Europe, roitelet triple bandeau, bec-croisé des sapins, petit-duc, mésange bleue…). Les deux espèces les plus impressionnantes, le lion de l’Atlas et la panthère ont disparu, le premier dans les années 1920 et la seconde, récemment, dans les années 1980-1990.

La cédraie représente un écosystème fragile et menacé. Son équilibre est affecté et menacé par différents phénomènes (surpâturage, écimage et émondage par les bergers et troupeaux, attaques parasitaires, écorçage par le magot, mauvais traitements sylvicoles, changement climatique…). Une meilleure connaissance des phénomènes qui fragilisent cet écosystème grâce aux études scientifiques récentes devrait permettre la mise en place de traitements mieux adaptés pour la sauvegarde et la régénération de la forêt, mais la préservation de ce patrimoine est très complexe, et il sera long et difficile.

L’écotourisme peut jouer un rôle positif dans la cédraie, mais il ne faut pas qu’il soit utilisé seulement comme un argument marketing pour y attirer plus de monde sans au préalable sensibiliser et éduquer les touristes et les habitants au rôle vital que représente la forêt de cèdre pour l’équilibre écologique et pour l’avenir du Maroc. Un nouvel écomusée, “La Maison de la Cédraie”, a ouvert dans le Parc National d’Ifrane, sur la N13 entre Azrou et Jebel Ebri, et nous espérons qu’elle puisse contribuer efficacement à cette sensibilisation.

La cédraie est le dernier rempart vert entre le Sahara et l’Europe. Sa sauvegarde doit être considérée par tous comme une priorité, cela est capital pour l’avenir du Maroc.

Pour en savoir plus, lire : “Le cèdre de l’Atlas, mémoire du temps” aux éditions “La Croisée des Chemins” Mardaga.

Claire Martin
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